tu tournes en rond, jasp, tu sais plus quoi faire. t'es sur les nerfs, t'es un peu déphasé, t'as envie de péter un câble. mais tu peux pas le faire, parce qu'ana comprendrait pas, que les miliciens comprendraient pas, que personne comprendrait, en fait. seul toi, avec tes pensées si profondes, avec ton étrange fascination, pourrait comprendre. quelle horreur. ça fais trois jours que t'as enfermé oscar, et t'as pas fermé l'œil depuis, parce que tu sais que quand il rentrera, ça se passera mal. t'attend pas à ce qu'il comprenne, tu sais qu'il a déjà pas accepté que tu fasses partie des miliciens. alors accepter que tu l'ai foutu en taule ? putain, jasp, qu'est-ce que t'es con. mais plus t'y repenses, plus tu sais que t'avais pas vraiment le choix. il y avait un militaire, pas loin, un des membres du conseil. et si tu l'avais pas fais, toi, t'aurais probablement été banni, et sans doute qu'oz se serait fait battre à sang. ana vous aurait probablement jamais revu, et tu refuses ça. tu refuses de laisser ta meilleure amie, ta sœur, seule ainsi. elle a pas besoin de ça, la pauvre, elle a déjà tellement à pensé. enfin, t'imagines. elle t'a pas adressé la parole depuis que t'as enfermé oscar, faut dire, alors pas évident de savoir ce qu'elle pense. « putain... » tu pousses un juron en te levant, t'as glissé contre tu sais pas trop quoi, t'as manqué de te rétamer au sol, comme un con. aujourd'hui c'est pas ta journée, tu l'sens, tu l'sais, va s'passer un truc qui va encore plus te démoraliser. tu sais pas encore quoi, t'en as même aucune idée, mais il va s'passer un truc, c'est certain, et ça te déprime. alors tu soupires, de toute façon tu pourra pas l'éviter, t'es fataliste, jasper, tu sais que si tu sens un truc, quoique tu fasses, ça arrivera. alors tu sors de ta chambre, tu cherches un peu ana, mais tu te rend vite à l'évidence : elle est pas là. il est sept heures, elle a dû partir bosser. ou alors, peut-être a-t-elle encore découché, et dans ces cas-là, tu sais vraiment pas où elle est, putain. t'as la maison pour toi tout seul, comme les premiers jours de l'épidémie, et ça fais longtemps que c'est pas arrivé. tu pourrais prendre ton temps, profiter du matin, t'as pas à te presser après tout, t'es le seul à avoir besoin de te préparer, n'est-ce pas ? alors, ouais, tu te presses pas, tu descend te préparer un café, votre ration est presque vide, c'est probablement ton dernier café pour le moment. tant pis, t'ira voir dimitri, le café est meilleur là bas. un peu de sucre, puis tu te retrouves accoudé au comptoir de ta cuisine américaine, soufflant longuement. c'est fou parce que, au fond, oscar te manque. le voir te manque, beaucoup. et le savoir en taule te rend fou, totalement dingue, tu sais pas comment vivre avec ça sur la conscience. et puis t'entend la porte qui s'ouvre, tu réagis pas au début parce que tu te doutes que c'est ana, ça peut être que elle de toute façon, puisque oz est en prison. alors t'attend un peu, qu'elle te rejoigne dans la cuisine, mais c'est pas elle que tu vois passer la porte. ton cœur qui loupe un battement, tu pourrais presque t'évanouir quand tu te retrouves face à l'objet de tes plus profond désirs. soudain, t'es mal à l'aise, t'as envie de partir en courant, de t'enfermer dans ta chambre et de te cacher sous ta couette, comme quand t'avais dix ans. t'es un enfant, jasper, t'es pas capable de faire ça. quand ton regard croise celui d'oz, tu vois sa mâchoire se contracter, et tu sais qu'tu vas passer un sale quart d'heure. « oscar... » tu souffles, sans vraiment pouvoir t'en empêcher. il a probablement pas envie de te parler, t'en as bien conscience, mais t'as besoin de savoir qu'il t'en veux pas. chose un peu impossible, d'ailleurs. à sa place, tu lui en voudrais à mort. tu lui pardonnerais probablement jamais. « je.. je suis désolé. » ça sort comme un murmure, comme une prière, au fond. t'as les yeux baissés sur ta tasse de café, t'es incapable de le regarder.
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